Cancers du sein métastatique. Approche psychologique
Natacha ESPIE, Paris
Si l’on associe maladie métastatique et problèmes psychologiques, à qui pense-t-on aux patientes ?
Aux soignants ? La réponse première serait aux patientes, certes, mais pas seulement, parce que ce
qui constitue cet exercice de funambulisme qu’est la pratique médicale, c’est la rencontre de deux
psychismes, celui des patientes, celui des soignants.
Et cette rencontre est une relation complexe où les informations, les actions des soignants vont
produire des effets somatiques, mais également en miroir, des réactions psychologiques et il
appartiendra aux soignants de les prendre en compte.
« Être guérie, guérison » voilà des mots que les cancérologues prennent grand soin de ne jamais
associer à celui de cancer. Les patientes ressentent elles-mêmes qu’en matière de cancer, le retour à
un monde antérieur est problématique, elles espèrent cependant que le cancer se cantonne à un
passé douloureux. C’est à ce désir que le diagnostic de métastases vient mettre un terme.
Alors il faudra oublier l’idée de guérison et les patientes qui ont déjà connu l’épreuve des traitements
anticipent d’éventuelles souffrances psychologiques associées à une dégradation de leur image
corporelle.
Les réactions suscitées per cette annonce de métastases iront chez les patientes de la sidération à la
résignation en passant par l’incrédulité, la révolte, la colère, le déni, la fuite, le désir d’abandon de
tout traitement.
D’autres problèmes se posent aux soignants. Comment annoncer, comment répondre aux questions,
comment éviter la brutalité ou la fuite. La vérité pour reprendre la formule de Vladimir Jankélévitch
est « un élixir puissant qui peut être mortel… et qu’il faut administrer à doses graduées »
Il faudra aussi s’acquitter de cette tâche au moment opportun, sans précipitation, et accompagner
les patientes sans négliger de prendre en compte la détresse morale au même titre que les troubles
du corps.
Pour les patientes il s’agira d’apprendre à vivre avec une maladie métastatique, ce sera un long et
difficile louvoiement entre déni et reconnaissance de la maladie, et le soutien psychologique pourra
alors se révéler nécessaire et utile. Il faudra trouver la force de ne jamais faire le deuil de soi-même
et réapprendre le désir non pas de survivre mais de vivre.